Regards sur la peinture de Jacques Bringuier...
Michel Roquebert, Ecrivain et journaliste
Yvon Le Bras, Directeur de l’IPPMS, ensuite de l’IRTS, Montpellier
Michel Roquebert, Ecrivain et journaliste
Michel Ribstein, Médecin-Psychiatre, Chef de service à l’Hôpital de la Colombière, Montpellier
Bernard Salignon, Docteur d’état en philosophie, Professeur d’Esthétique, Coresponsable du DEA « Ethique et esthétique en psychanalyse » à l’Université Montpellier III
Yves Rouquette, Ecrivain, Poète, Auteur de pièces de théâtre en Occitan et en français
Elisabeth Mercier, Psychologue-clinicienne, Psychanalyste
Claude-Henri Bartoli, Peintre-plasticien, Commissaire d’expositions, Consultant au service culturel de la Mairie de Bédarieux
Texte récent :
Jean-Marie Perret, Psychologue, potier, pédagogue : "Jacques
Bringuier expose à la Colombière !"
Janvier 2015
« C’est au cours de l’été 1964 que je rencontrai pour la
première fois la peinture de BRINGUIER : le château de Nérac
accueillait alors le XIe salon « Art Nouveau » (…)
(…) BRINGUIER peignait alors de véritables tératologies rouge
sang. On était comme devant l’étal de quelque monstrueuse
boucherie, au milieu de chairs déchirées et ruisselantes. Et de
ce théâtre de la cruauté montait un cri.
(…) Ce qui me frappe chez BRINGUIER, c’est que son art même, au
sens le plus technique du terme, tel qu’il le possède
aujourd’hui, avec ses compositions apparemment diffuses (mais
dont le détail est extrêmement condensé), sa touche vibrante de
naturel et de sensibilité, ses griffures d’une nervosité qui
n’est jamais de la sécheresse, ses harmonies de couleurs qui
s’imposent avec une rare qualité d’évidence - tout cela,
c’est-à-dire le métier admirablement dompté, secrète sa propre
poétique, et ses propres significations. BRINGUIER ne peint rien
d’autre que sa peinture, sans aucune référence à quoi que ce
soit ; et pourtant, il n’est pas « abstrait ».
(…) [Aujourd’hui] chacune de ces toiles est un œil clos tourné
vers les replis silencieux du rêve. Et voici que pour nous ce
rêve se fait images, leur texture même contraint notre regard à
les scruter, les fouiller, à les interroger, jusqu’à ce que
s’établisse le contact, jusqu’à ce que passe le courant de
sensibilité sans lequel une œuvre d’art demeure chose inerte.
(…) »
Michel Roquebert, Exposition Musée Fabre,
Montpellier, novembre - décembre 1978
« (…) Quelques lignes, à mi-chemin entre le visible et
l’invisible, l’être-là et le pas encore, dans le registre du
presque rien, viennent étirer cette peau première sans
l’écarteler, la tendre légèrement comme une caresse, parfois la
griffer, rarement la déchirer, sans la détruire. Il n’est
peut-être pas excessif de parler ici de préliminaires. L’acte de
peindre est amoureux. Tout acte l’est…
(…) L’huile, l’eau, la poudre des couleurs, la crasse et la
pureté, la boue et la lumière : comme un champ du possible, on
ne fait pas mieux. La peinture est affaire mêlée à l’extrême,
toute de détours, de rencontres et de surprises. Rien ou presque
n’y est jamais joué d’avance.
(…) Bien sûr, le quotidien n’est pas absent de la peinture de
BRINGUIER. Il est des éléments, déposés, sédimentés en nous
depuis la naissance du regard et qui tiennent à ses conditions
premières de possibilité : il y a un ciel et un sol ; nous avons
appris à voir à travers la fenêtre, la porte ouverte, dans le
miroir, entre les paupières… (…) »
Yvon Le Bras, l’Atelier contemporain, Anduze, août
1982
« La recherche de Bringuier semble s’orienter vers une
exploration des données sensibles de la matière où se crée le
visible. Ce dernier se nourrit de sensations incorporées et
restituées, dans un certain ordre assemblées, sur la surface de
la toile saturée, et dans la stratification des couches et des
touches. L’absence de dessin suppose une volonté de renoncement
à la postulation rationaliste. Cela n’exclut pas les
récurrences, effets de rythmes ou effets identifiables. Ils
déterminent un style et sont autant de balises évitant au
lyrisme virant du peintre de se disperser et de sombrer dans la
confusion… »
Yvon Le Bras, Exposition Salle Octant, Montpellier,
mai 1987
« C’est au cours de l’été 1964 que je rencontrai pour la
première fois la peinture de BRINGUIER : le château de Nérac
accueillait alors le XIe salon « Art Nouveau » (…)
(…) BRINGUIER peignait alors de véritables tératologies rouge
sang. On était comme devant l’étal de quelque monstrueuse
boucherie, au milieu de chairs déchirées et ruisselantes. Et de
ce théâtre de la cruauté montait un cri.
(…) Ce qui me frappe chez BRINGUIER, c’est que son art même, au
sens le plus technique du terme, tel qu’il le possède
aujourd’hui, avec ses compositions apparemment diffuses (mais
dont le détail est extrêmement condensé), sa touche vibrante de
naturel et de sensibilité, ses griffures d’une nervosité qui
n’est jamais de la sécheresse, ses harmonies de couleurs qui
s’imposent avec une rare qualité d’évidence - tout cela,
c’est-à-dire le métier admirablement dompté, secrète sa propre
poétique, et ses propres significations. BRINGUIER ne peint rien
d’autre que sa peinture, sans aucune référence à quoi que ce
soit ; et pourtant, il n’est pas « abstrait ».
(…) [Aujourd’hui] chacune de ces toiles est un œil clos tourné
vers les replis silencieux du rêve. Et voici que pour nous ce
rêve se fait images, leur texture même contraint notre regard à
les scruter, les fouiller, à les interroger, jusqu’à ce que
s’établisse le contact, jusqu’à ce que passe le courant de
sensibilité sans lequel une œuvre d’art demeure chose inerte.
(…) »
Michel Roquebert, Exposition Musée Fabre,
Montpellier, novembre - décembre 1978
« (…) L’espace au propre, support d’un temps au figuré, est fixé
par la lenteur de la finition, la poudre des pigments déposée en
alluvion vertical.
(…) Aujourd’hui, il réapparaît d’abord dans
un cri. Des couleurs vives, jaunes et rouges, brusques et
brutales. Des éclats de protestation plus que de joie : une
effervescence, le foisonnement des kits, le brillant des surfaces
« à emporter » -moquerie et dérision- jeu et coupures
énigmatiques. (…) »
Michel Ribstein, Exposition Salle Octant, Montpellier,
mai 1987
« Perdre la forme pour retrouver les formes, puis perdre les
formes pour retrouver la terre, le sol.
Ce qui remonte, comme un souffle par delà la tension créée est
cette puissante déliaison des commencements qui ouvrent dans la
peinture la dynamique des sensations. Dans la main, dans la toile
la terre effritée redevient sol.
Par bandes, souvent l’ici en trois se pose et s’oppose.
Peut-être ce sont ces sensations qui échappant à l’ordre certes,
laissent être l’abrupt et alors le foisonnement devient
immédiatement mémoire-espace-couleur-racine-rivières…
Cet acte qui s’interrompt renoue avec le premier dessillement,
cette effraction qui noue réalité et apparition. Peinture en
battement animé.
Lentement par bonds successifs remonte un fond qui est notre
naissance, ces chocs et leurs écarts disent le calme perdu mais
jamais oublié.
Sentir les terres - la peinture devient terres vivantes qui
avancent dans le bleu, le brun et se retirent dans le blanc et
l’ocre.
Maintenant on le sait : peindre c’est prendre un appui vers un
au-delà de soi qui est ce contact où le geste, le fond, l’homme,
rencontrent leur provenance en l’accomplissant.
Rien n’est donné – sauf peut-être ce faux départ d’où ce qui
provient réclame toujours à construire - ce sous-venir des terres
qui parce qu’elles ont porté l’œuvre et l’homme attendent encore.
Il semble que la peinture de Bringuier soit venue interrompre le
geste par un déchirement et l’offre à cette dispersion où chaque
forme s’appuie sur l’autre et toujours déclot le monde de sa
totalité.
Regarder sa toile, la respirer, se sentir démuni et léger car ces
terres nous attirent là où il reste encore à l’homme à œuvrer. Et
notre regard pourrait se perdre dans l’infini éclatement de la
matière si à intervalle irrégulier et abrupt la pulsion
n’indiquait au creux d’elle-même sa source, point qui échappe au
désordre pour harmoniser le rythme et l’instant.
Echange d’échanges - ce qui change vient des bords où l’air et la
terre se confondent et se fondent en couleurs : l’image attend
derrière nous parce qu’absente elle laisse au tableau son envoi
original.
Oui l’homme est ici étrangement absent du paysage mais revient
dans son geste d’où il est toujours parti - son corps ses terres
rassemblés par leur départ devient cette communauté d’où il a vie.
Ici en trois - les bandes, chacune d’elle échange aussi la trace
de leur origine commune, qui est hors de l’idée, tendent et
tissent cette distance en couleur puis s’élèvent.
Cette évidence des rapports ne clôt pas le sens l’envoie dans
cette contrée où naissent les formes aimant leur retrait, pour
qu’encore la peinture en devienne la trace existante de leur
passage sur cette terre.
Face aux toiles on s’approche de plus en plus pour retrouver dans
ce mouvement celui du peintre -se mouvoir-toucher-voir-traverser
l’espace et revenir vers ce qui se dérobe.
La source sentie n’est plus la source, elle est ici en trois parce
qu’elle consent et convient.
Tout instant dessine un autre lieu, on quitte la toile, on perd
ici le trois, abandonnés au dehors il nous faut rejoindre en nous
cet enfant qui revient d’un pays innommé. »
Bernard Salignon, Exposition Salle Gustave Fayet,
Sérignan, octobre 1995
« Il en est de la peinture comme de la poésie. C’est un travail
qu’on fait à deux. Quelqu’un parle et l’autre incorpore la parole
et lui donne la vie. Quelqu’un peint et un autre laisse l’œuvre
peinte lui labourer le corps et l’âme et y faire germer
l’improbable et parler d’indicible.
(…) Ecoutez plutôt Guillevic :
« Il est des monstres qui sont très bons
Qui s’assoient près de vous, les yeux clos de tendresse
Et sur le poignet
Posent leur patte velue.
Un soir
Où tout sera pourpre dans l’univers,
Où les roches reprendront leurs trajectoires de folies
Ils se réveilleront. »
(…) Laissez-vous tout entier saisir par ce que cette parole
serrée, ignorant le discours, enferme d’intranquillité
psychologique et métaphysique et aussi de grands mythes à faire
pleurer d’espérance.
(…) De cette rumination où le langage se fait chair et non plus
moyen de communiquer, de marchander et de convaincre et que je
vous souhaite lente et plusieurs fois recommencée dans les jours à
venir, vous allez sortir autre : plus vous-même qu’avant, toujours
aussi maigre de foi et affamé d’espérance, mais enfin assuré que,
tous, nous valons mieux que le destin.
Allez de même à l’œuvre de Bringuier. Faites-vous oublieux des
théories, des recettes de l’esthétique qui n’est que crasse au
goût du jour.
(…) Car il s’agit beaucoup moins d’œuvre d’art que de besogne
d’homme. Un homme dont je crois que, doux et entier, humble de
cœur et bouillant d’impatience, inquiet et rayonnant, de bel
appétit et d’éthique exigeante, il n’avait d’autre raison à sa vie
que de peindre et d’aimer, que d’aimer et de peindre. Que de
laisser son corps, de la plante des pieds à la main beaucoup plus
qu’au cerveau, exprimer non point tout ce qu’un être sait que ce
qu’il chercher patiemment, obstinément : l’illumination au bout de
la nuit obscure, l’équilibre au sein du désordre, la douce et âcre
intelligence du destin.
(…) Sans doute [sa peinture] est-elle particulièrement méfiante à
l’égard de la figuration directe. Il ne s’agit pas ici de montrer
mais de donner à voir, d’expliquer que de faire se lever les
questions, de dire que de mettre l’homme en état de parler pour
son compte.
(…) Si l’art de Bringuier se nourrit d’oubli, de tâtonnements
impérieux, de coups de sang organisés en espaces et en figures
c’est tout autant pour célébrer que pour nier l’absence. Dans ces
tableaux rien n’est là et tout est là, ensemble, dans une
saisissante tension de tout l’être, âme et corps, mémoire et
désir, déréliction et gloire pétris et boulangés.
(…) Bringuier n’ignore rien de ce que la peinture de son siècle a
apporté de dur et de neuf, de déroutant, de fulgurant, d’audaces
vraies et de coquetterie, d’attristant et de jubilatoire à la mise
en formes et en couleurs d’une surface plane qu’elle soit de bois,
de papier, de toile ou de ciment frais. Mais s’il se nourrit de
modernité comme un ogre de chair fraîche, c’est seulement pour
tâcher d’être lui, impossible à confondre, comme une voix qui
monte, ronde, bleue et unique d’un chœur.
(…) Sa démarche est tout aussi morale qu’artistique, mystique que
laïque.
(…) Si la peinture de Bringuier me travaille comme une suite de
poèmes, si elle me remplit de tonique inquiétude et d’espérance
indestructible, c’est surtout qu’elle témoigne au-delà des
malheurs collectifs et des souffrances personnelles de la
permanence du sacré.
Entre le très beau jeune homme, si soucieux de dire vrai en
peignant juste, de faire co-habiter l’éternelle beauté du grand
absent et sa mère et les humains des camps de la mort, les
travailleurs de la terre, de la mer et des usines, entre cet homme
tellement concentré et tellement heureux que je voyais couvrir de
fresques la chapelle du Mont Saint-Clair à Sète et l’homme de 83
ans que je regarde, droit et intègre, cuisiner longuement ses
fonds puis en faire surgir le jamais vu, l’à peine pensable, les
figures en attente d’être comme des amis inconnus qu’on cache dans
la barque, la croix innombrable ou la courbe d’un sein.
Tout est mis en chantier pour renvoyer à leur néant le profane,
pour que s’aiguise la faim d’infini, pour que le désert prenne
sens, pour que le dénuement jubile, pour que l’éternité clignote
dans le mystère de la mort.
(…) Cet homme aime. Il aime le monde dans le double sens que la
langue populaire trouve à ce mot : terre et ciels, hommes et
femmes. Il peint et le monde est là, dans sa vastitude, ses
constantes architectoniques, mais aussi avec tout ce que la
mémoire peut en retenir, en éclats : villes dévorantes, ports qui
invitent beaucoup moins à partir qu’à s’affronter à l’infinité des
possibles, hommes cherchant à happer l’air, couples qui se
cherchent, se trouvent et se dissolvent, diables ricanants,
cheveux cabrés. Tandis que la terre se tait, que l’histoire se
terre, que la ruine se rêve, partout se dresse l’homme.
Il n’y a d’autre cuirasse que son arbre veineux, que la toile
d’araignée de ses nerfs à vif, d’autre visage que ses rides et,
pour lui, la mort vient qui a le regard de l’aimée.
Yves Rouquette, Exposition Espace Paul Riquet, Béziers, janvier-février 2004
« On ne voit que ce qu’on regarde. » Merleau-Ponty
« Marcher d’un tableau à l’autre, c’est, comme la marche en
montagne, aller vers une solitude essentielle, pourtant peuplée
d’autres, passants et passantes, à travers l’évocation de corps,
dont, sans les fixer, des fragments, des signes discrets sont
captés, dont les traces, dépôts mémoriels, sont donnés à voir dans
une sorte de défilement à l’image du temps qui passe.
Laisser une trace, c’est se savoir mortel. Il y a quelque chose
d’intranquille dans ce savoir-là. Jacques Bringuier nous donne
matière à l’apprivoiser en nous, nous fraye la possibilité de
regarder, de prendre le temps de regarder ce qui nous regarde en
propre, chacun, chacun, exilés que nous sommes de l’origine et de
la fin.
Marcher d’un tableau à l’autre, c’est aussi aller vers une
pacification. C’est consentir au temps qui passe plutôt que de le
défier. La voie indiquée, dans ce patient travail de peindre,
témoigne que ce qui arrive ouvre à une transformation, qui n’est
exempte ni de cruauté, ni de joie.
Consentir au temps qui passe, non pas seulement dans une
résignation qui cherche consolation ou dans un déni qui précipite
vers la recherche de sensations fortes et anesthésiantes, ça peut
être ici faire une pause, prendre le temps de regarder, laisser
les œuvres présentées prendre possession de nos sens, faire
confiance, comme les tableaux de Jacques Bringuier nous le
proposent, à la seule peinture, à ce que ça éveille en nous
d’agréable et de désagréable.
Sa peinture est vivante comme une peau souple, qui incorpore ce
qui s’y imprime, qui en garde les empreintes, qui porte les
marques des blessures, des coupures, des scarifications et des
pliures. Ce qui nous touche est lié à une évidence qui dit une
proximité et une impossibilité d’accès qui dit la séparation.
C’est aussi aller vers la joie, qui résulte d’un allègement et
d’une ouverture des sens multiples. La joie de « la magie » de la
trace d’une perception. Celle d’une présence au travers de son
absence.
La trace laissée par le geste qui a modifié durablement le monde
visible. La trace d’une chose éloignée qui vient vers nous et vers
laquelle aller. La trace d’une chose montrée, qui garde pourtant
sa part d’énigme.
Elisabeth Mercier, Exposition Espace d’Art Contemporain, Bédarieux, octobre-décembre 2008
JACQUES BRINGUIER L’ICONOCLASTE A IMAGES
L’artiste dont nous pouvons voir les œuvres en ce dernier
trimestre 2008 dans les salles contemporaines du MUSEE de
BEDARIEUX, mérite par son exigence, sa rigueur, sa maîtrise
technique, mieux que le regard en passant du visiteur ; il
nécessite une longue visite, un œil actif, comme avec un ami rare
et précieux, comme pour un monde sur le point de disparaître et
dont la présence est là, bien réelle pourvu que nous prenions le
temps. JACQUES BRINGUIER s’est attaqué au saint des saints de
l’art, de la pratique artistique : LA PRESENCE… ce qui manifeste
ou rend manifeste la présence, dont le nom est multiple, est ici
présenté-représenté dans l’œuvre pour témoigner de l’impossibilité
de dire cet ETRE qui est présent. On voit tout de suite la
difficulté pour parler de ce qui ne se dit pas, de ce qui
fugacement se manifeste, par éclair, fragments ou éblouissement,
et qui pourtant occupe tout plasticien qui cherche, non pas un
amusement, pas même un regard critique sur la société et son temps
comme nous le verrons après Bringuier avec les œuvres de DAUMIER,
mais l’éternité même de l’acte créateur dans sa tentative de
sur-prendre l’éphémère présence de l’ETRE, cet être vu ici comme
la matière même du monde et de ses avatars : tout ce qui est
vivant que nous le sachions ou pas, je pense ici à Goethe disant :
Sentir l’être s’accroître sous l’écorce des pierres… et à Arthur
Rimbaud, un autre visionnaire, écrivant parlant de cette
exploration de l’intime : si ce qu’il trouve a forme il ramène la
forme, si c’est informe il ramène l’informe… Donner à voir par
des… « images » … Que l’artiste me pardonne le mot, de ce qui ne
peut se voir, c’est un pari, un risque, une aventure individuelle
et malgré tout fraternelle, à laquelle nous convie Jacques
BRINGUIER, c’est aussi le somptueux banquet de la vie, qui réclame
toute notre attention, notre passion, notre amour. Ce tour de
force qui consiste à déstructurer, détruire une image, une vision,
pour la faire apparaître sous un autre jour, cela mérite l’oxymore
: iconoclaste à images…
Claude-Henri Bartoli, Exposition Espace d’Art
Contemporain, Bédarieux, octobre-décembre 2008